Suite à un quiproquo, l’entourage de Sémione Sémionovitch Podsékalnikov, jeune chômeur désenchanté (Jérémy Lopez) est persuadé qu’il va se tuer. Mais on ne meurt pas comme on veut dans la Russie stalinienne… Intellectuels (Serge Bagdassarian), commerçants (Christian Gonon), artistes (Yoann Gasiorowski) et femmes de petite vertu (Anna Cervinka et Léa Lopez) tentent d’obtenir que Sémione se suicide en leur nom, car « seuls les morts peuvent dire tout haut ce que les vivants pensent tout bas ».

Écrite en 1928 et interdite par Staline avant même sa création, la pièce de Nikolaï Erdman (1900 – 1970) dresse un sombre portrait de la Russie de l’entre-deux-guerres : logements minuscules, promiscuité du voisinage, immixtion permanente dans l’intimité de chacun… le constat du dramaturge est acerbe – et peut-être toujours d’actualité.

La première heure du spectacle, menée tambour battant, est un très bon moment de théâtre. On peut toutefois regretter que la mise en scène de Stéphane Varupenne s’essouffle ensuite, à mesure il est vrai que la pièce perd de son unité. Les scènes, inégales, se succèdent alors, sans véritable cohérence artistique. La soirée, toutefois, offre une nouvelle démonstration de la qualité de la troupe fort nombreuse – quinze comédiens et trois musiciens ! – qui s’amuse manifestement beaucoup à défendre ce texte burlesque, cynique et profond.

Y. A.

« Le suicidé », Comédie-Française (salle Richelieu), en alternance jusqu’au 2 février 2025 (durée : 2h20).